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Potarement - Chapitre 08

Les Années de Revendications

Je descends de l'avion, passe la douane et me dirige vers la sortie. En passant devant un kiosque mon regard croise la une de "La Tribune" qui parle de la guerre des gangs motards.

Mon esprit fait un Flash-Back et je repense à la revendication motarde en France, aux anecdotes lors de certaines manifestations, une autre époque.

J'ai été de tous les combats dès le début des années 80 et jusqu'au milieu des années 90. J'étais là à la création de la FFMC (Fédération Française des Motards en Colère) que j'ai quittée rapidement pour, dans le début des années 90, y revenir en tant que membre du Bureau de Paris Ile-de-France, et repartir tout aussi vite que la première fois. J'ai bien connu SOS MOTARDS avec Papy Joe, Didier et les autres, une sacrée équipe pleine de pêche. J'ai aussi fait partie des membres fondateurs de l'ANDDB (Association Nationale De la Défense des Bikers).

Voici mon point de vue sur la question, vécu de l'intérieur.

Dans un premier temps parlons un peu de ce qui a existé et existe encore de nos jours en France :

La FFMC, considérée par le pouvoir comme seule représentante des associations revendicatrices motardes, en oublie ses racines.

Elle est née de plusieurs Clubs fédérés autour d'une volonté de "SAUVER LA MOTO" en cette fin des années 70 et ce début des années 80. Ces clubs avaient leurs différences et leurs idées bien distinctes et ont réussi à créer à cette époque une machine de revendications qui a donné plus d'une sueur froide à plus d'un ministre. Les actions étaient massives et unitaires, mais dans les années 90 des personnalités fortes ont voulu politiser l'association et ont fait du délit de sale gueule. Un petit noyau dur à la tête uniquement mais qui eut des répercutions encore visibles de nos jours.

Dans les années 90 le noyau dur est sur Paris, mais n'oublions pas que la FFMC est nationale et que beaucoup de clubs en province ont créé des antennes et ont continué, comme ils le faisaient auparavant, à mener des actions locales extraordinaires.

Aujourd'hui certain d'entre eux ont repris leur indépendance et continuent toujours à faire des actions de sécurité routière et caritatives. Donc en ces années 90 la FFMC est en perte de vitesse et un noyau dur veut durcir la lutte et la politiser. MAIS LÀ FUT L'ERREURE FATALE. Beaucoup de membres quittent la FFMC et créent SOS MOTARDS. Dans le même temps se crée l'ANDDB. En 95/96, sous l'influence de 3/4 personnes, dont votre serviteur, on arrive à mettre dans la rue, chose rare, ces trois assoces.

Le petit noyau dur de la FFMC voulait garder le leadership et voulut bien accepter ces assoces mais en les intégrant sous leur giron, ce qui fut refusé de suite. La déchirure arriva quand SOS MOTARDS, premier représentant des motards avec l'ANDDB au sein de la FEM (Fédération Européenne des Motards) se fait déloger par la FFMC qui, grâce à la présentation de chiffres extraordinaires d'adhérents, fait valoir qu'elle était la seule à pouvoir siéger et représenter la France. Ces chiffres étaient un montage judicieux intégrant les membres de la Mutuelle des motards entre autres ce qui donnait un nombre impressionnant de membres, alors que la réalité était toute autre. La deuxième Maxi déchirure fut lors de l'Euro Démo du 18 Juin 1994 à Paris où SOS MOTARD fut exclue de l'organisation.

De nos jours depuis la fin des années 90 et le début des années 2000, bien qu'il reste encore des membres de la FFMC qui jugent les gens selon leur ressentiment et non par rapport à ce qu'ils peuvent apporter au mouvement, il y a une nouvelle génération plus à l'écoute et ouverte au dialogue. Mais cette génération est MALHEUREUSEMENT vite mise à l'écart.

Avec ce type d'attitude le mouvement ne pourra pas se reconstruire et redevenir fort et rassembleur de la base motarde, car le tout n'est pas de siéger partout mais d'être fédérateur de tous les motards avant tout.

Aujourd'hui certains membres sont malheureusement devenus des fonctionnaires de la revendication, ont perdu la réalité du terrain, à l'exception de certaines antennes locales super actives et super compétentes. Je pense que le Bureau National et PPC (Paris Petite Couronne) de la FFMC devrait s'en inspirer et ne pas vampiriser les initiatives locales pleines de fraîcheur en tirant la couverture à eux.

Maintenant que le décor est planté je reconnais qu'aujourd'hui réussir à rassembler des motards devenus plus des utilisateurs que des passionnés est difficile. La flamme sacrée qui représentait le milieu motard des années 60/70/80 est bien loin.

Pour exemple, le manque de solidarité sur les routes de nos jours ; la création de tel ou tel clan, les GSX entre eux les trails entre eux, les..... et oui, le corporatisme dans notre monde par la création de multitude de clubs dédiés à tel ou tel modèle ou marque ou type de motos s'en est ressenti au niveau de la revendication. Car telle ou telle famille, pour légitimer son existence bien souvent éphémère, crache sur les autres pour se sentir exister. Mais ils ne comprennent pas que la moto c'est un ensemble de choses, UNE passion immuable de LIBERTE et que peu importe le Flacon quand le plaisir est là...

La revendication et la lutte ont aussi été tuées par les politiques qui ont tout fait pour récupérer le mouvement, en ayant leurs représentants motards à tel ou tel poste pour se donner bonne conscience, comme ils l'ont fait avec l'intégration positive des minorités diverses. Le fait d'avoir son motard par ci par là a distendu le mouvement de base. De plus avec l'âge, les jeunots du début se sont mariés, ont changé de mode de deux roues, sont passés du 750 Four au Gold, et là encore les jeunes qui les croisent ne voient en eux que des vieux CONS de bourges.

Tout cela a tué la mobilisation et notre passion. L'adage "Diviser pour mieux régner" est tout à fait bien à propos dans ce cas, et le politique de tout bord l'a bien compris et a su, dans les années 90, mettre toute son énergie à réaliser son plan diabolique : casser le milieu motard.

Le combat est mort également pour une autre raison plus simple que voici : Le fait que beaucoup de jeunes arrivent à la Moto par rébellion vers 18/20 ans, en sortent vers 25/26 ans pour causes de famille, et que seuls 30% y reviennent après 35 ans car la passion les habite encore.

La revendication est morte car les automobilistes et l'opinion publique, qui ont soutenu le mouvement dans les années 80 et début 90, l'ont lâchée aux vues des comportements de certains motards sur la route. Coups de Latte dans les portières, Rétros arrachés etc.... Et les médias ont su à cette époque relayer les faits à forts coups de flashs info.

A partir du milieu des années 90, et plus particulièrement au début 2000, les médias ont enfoncé le clou en montant en épingle tel ou tel fait de délinquance routière quand il s'agissait d'un motard. Pour 800 infractions d'automobilistes celle d'un motard est de suite médiatisée.

Prenons l'excès de vitesse de ce pauvre motard en 1300 Hayabouza qui sur une nationale s'est fait prendre à plus de 200 km/h. OK il a fait le CON, mais de là au lynchage médiatique qu'il a subi! Il faut dire que depuis l'affaire du Prince Noir les autorités voulaient se faire un exemple bien marquant. Mais de là à faire l'ouverture du 20heures de TF1 et France 2, ainsi que des quotidiens nationaux... il y a bien deux poids deux mesures.

VOILÀ CE QUI A TUÉ LA MOBILISATION ET LA REVENDICATION : L'ensemble de deux actions menées. L'une par la seule assoces reconnue par les politiques et médias, la FFMC qui a voulu et veut encore à ce jour régner seule ; et l'autre par le politique qui a trouvé dans les motards son faire-valoir pour justifier sa politique de répression routière envers tous...

Maintenant on pourrait en faire des tonnes et des tonnes du pourquoi du comment...

J'ai essayé d'aller au bout de mes idées et d'aller voir de l'intérieur aussi bien au niveau des assoces revendicatrices que chez les politiques. Et une seule chose m'a marqué : La lutte interne pour le leadership avant le combat de l'idée. Ces femmes et ces hommes qui se disent représentants de notre passion ou qui se disent représentants du peuple passent plus de temps à conforter leur cour, leur poste, et se battre pour garder leur pouvoir que de défendre ce pourquoi ils sont là !

Leur énergie est plus occupée à se défendre en interne contre leurs alliés qu'à défendre leurs idées. Et même encore plus fort ils mettent une énergie à discriminer telle ou telle personne de leur camp ou non par peur qu'avec sa façon de faire ou son énergie il prenne leur place aux yeux des autres.

Notre avenir est donc déjà bien loin derrière nous, tout comme pour les syndicats la lutte est finie ou sporadique malheureusement.

Alors continuons à lutter différemment ou autrement. À quand un magazine moto de renom ? (il en existe plus que deux, MJ et MR, dans le paf moto en France) Alors quand l'un de ces magazines fera la Manif des Manifs pour dire : "On existe avec nos différences, rien ne nous oppose aux autres alors respectez-nous tout simplement" QUAND ?, je me tiens à votre disposition.

Voilà la dure réalité de ce combat qu'est le notre depuis des lustres : Se faire respecter sur la route en tant qu'utilisateur à part entière. On nous dit que l'on doit rouler sur une voie comme une voiture, mais combien de fois quand on le fait les automobilistes ne le comprennent pas et ne le respectent pas, et cela idem lorsque l'on est entre les files de voitures. ALORS OÙ EST NOTRE PLACE ? Une question que l'on doit poser à nos politiques !

En ville nous sommes de plus en plus mal tolérés, idem hors agglomération. La phase deux des gouvernants ne serait-elle donc pas de retirer les deux roues du visage autoroutier de notre beau pays ? Il essaie depuis quelques années de les retirer des chemins forestiers et autres pour une question écologique.

Faisons un petit aparté sur l'écologie :

Ce mouvement ne serait-il pas un mouvement social qui prône une politique plus idéologique que réaliste sur les réalités de terrain ? Leur idéal ne leur fait-il pas perdre la réalité de tous les jours ? Ce qui est drôle est qu'ils sont rarement ouvriers et vivent dans des quartiers relativement privilégiés, prennent le train, le bus, et ont aussi une voiture. Ce qu'ils préconisent aux autres ils ne se l'appliquent que rarement. Et pour les médias ils se baladent une fois de temps en temps en vélo et voiture électrique.

Notre passion dépend de certain de ces idéologues, ce qui fait peur des fois. Car lorsque j'entends dire que la moto pollue 10 fois plus qu'une voiture sur un même trajet, j'aimerais bien comprendre comment a été faite cette étude.

Le dernier volet de ce chapitre explique la situation où nous nous trouvons, et celui des LOBBYINGS.

Ce volet est le plus simple. Une personne qui achète une moto pour se rendre à son taf n'utilise plus sa voiture et consomme donc moins. Les utilisateurs des grandes villes lâcheront leur voiture pour leur moto (ou deux roues) en réaction aux actions politiques qui visent à réduire la circulation en ville. Par conséquence, la filière auto peut se trouver en péril. On stigmatise donc les motards en marginaux et ceux qui ne peuvent faire autrement prendront ainsi leur voiture, les utiliseront donc plus (et donc consommeront plus), la filière auto sera ainsi sauvée CQFD.

Vous me direz que vient faire ce volet dans le chapitre Revendications ? Et là est LA QUESTION ! À votre avis qui à intérêt à ce que le monde du deux roues soit le bouc émissaire des mauvais maux de la sécurité routière aux yeux de l'opinion publique, QUI ?

Et pour arriver à leur fin quoi de plus logique que de détruire les mouvements revendicateurs motards ?

Pour clore ce chapitre j'aurais un seul mot à dire : Si l'on veut défendre notre passion on sera obligé de composer et de continuer à le faire par la moto-tourisme.

C'est à mon avis le seul moyen de faire comprendre à l'opinion que notre passion peut vivre en harmonie avec les autres et dans le respect des autres.

Malgré tout, on a connu tant d'anecdotes lors des manifs que j'ai organisé ! J'en garderai deux qui m'ont marqué et resteront gravées dans mon esprit :

On se concerte et nous nous décidons de les balader sur un itinéraire bidon de chez bidon. À tel point que le dimanche, jour de la manif, un mec vient vers nous et nous signale qu'ils sont au fait de notre volonté d'aller à tel ou tel endroit, et de surcroît à l'opposé de notre objectif. Sur place on avait envoyé voir des potes; il y avait des comités d'accueil qui nous attendaient toujours. Par contre nous sommes arrivés à bon port et atteint notre objectif avec un service minimum question képis.

Ces deux anecdotes ont marqué à toujours ma mémoire car tellement parlantes de ce que l'on pouvait encore faire à cette époque. Aujourd'hui face à nous on trouverait des canons à eau ou des CRS hargneux. Mais le pire est que ce sont des manifs comme celles-ci qui pourraient relancer le combat.

- PASQUAL !
- Oui ! Hein Quoi !

Je sursaute c'est ma petite femme qui est venue me chercher à l'aéroport, on saute dans un Taxi pour rentrer à la maison.

Chapitre 07
Chapitre 09

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